L'Europe mobilisée pour renforcer son industrie de défense, notamment face à la guerre en Ukraine

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L'Europe mobilisée pour renforcer son industrie de défense, notamment face à la guerre en Ukraine

La guerre en Ukraine ébranle l'Europe et suscite une mobilisation sans précédent autour des enjeux cruciaux de la défense. Sous l'égide de Thierry Breton, Commissaire européen français au marché intérieur, une tournée a été entamée dès ce mois d'avril 2023, à la rencontre des industries de défense européennes. Cette initiative a été couronnée par la présentation, le 3 mai 2023, d'une proposition : « l'Acte de soutien à la production de munitions ».

L’UE, marquée par la guerre en Ukraine, est consciente du besoin de se remobiliser autour de son industrie de défense. À travers cette proposition, Thierry Breton affirme avec conviction que l'Europe est prête à mobiliser davantage de ressources et à renforcer "l'Europe de la défense". Ce projet ambitieux, inscrit dans la perspective d'une production annuelle d'un million de munitions, vise avant tout à dynamiser et consolider la base industrielle et technologique de défense européenne, gage d'une réactivité accrue.

 

Dans la droite lignée de la "boussole stratégique", une initiative conjointe des États membres de l'UE visant à éclairer et à orienter la politique commune en matière de sécurité et de défense, cet acte se positionne comme un pilier fondamental.

 

L'aide apportée à l'Ukraine a mis en évidence les limites de l'industrie européenne de la défense. Forte de ce constat, la Commission européenne s'est attelée à identifier des solutions concrètes. T. Breton constate une base industrielle existante mais trop peu active qui doit être relancée. Voilà donc l'objectif ambitieux de l'ASAP (Act to Support Ammunition Production) qui, une fois adopté, sera déployé jusqu'en 2025. Cette impulsion européenne, matérialisée par une aide de 500 millions d'euros aux industries de défense, vise à encourager les partenariats transfrontaliers et les collaborations entre les acteurs privés et publics.

 

Il convient de souligner que cette opération repose sur une logique de co-financement. Les 500 millions d'euros alloués par la Commission européenne seront puisés dans l'instrument destiné à renforcer l'industrie européenne de défense grâce à des acquisitions communes (EDIRPA) à hauteur de 240 millions d'euros, et dans le Fonds européen de Défense, doté de 260 millions d'euros. Par ailleurs, la Commission exhorte les États membres à exploiter toutes les opportunités de financements, notamment les fonds de la politique de cohésion et la Facilité pour la reprise et la résilience.

 

Consciente des difficultés rencontrées par les industries de la défense pour bénéficier des fonds européens, l'ASAP devrait faciliter l'accès au financement des entreprises de l'UE spécialisées dans le domaine des munitions et des missiles, vraisemblablement grâce à la mise en place d'un mécanisme spécifique, appelé "Ramp-up Fund", annoncé par la Commission. Les entreprises les plus susceptibles de recevoir les subventions européennes sont celles capables d'accroître rapidement leur production. La logique européenne est claire : il faut agir vite pour augmenter rapidement notre potentiel de production.

 

Par ailleurs, cet acte prévoit également l'établissement d'une "liste de priorités" visant à répondre aux besoins urgents et actuels de l'Ukraine. Thierry Breton évoque lui-même l'impératif de "passer en mode économie de guerre".

 

Les régions françaises, et notamment notre Région Sud, sont pleinement engagées dans cet effort de soutien. En témoigne le récent déplacement du Président du Conseil Régional, Renaud Muselier, au nom de Régions de France, en Ukraine à l'occasion du Sommet européen des villes et des régions organisé à Kiev. En effet, la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur a déjà consacré 13 millions d'euros pour venir en aide à l'Ukraine depuis le début du conflit. Et cette solidarité ne fera que s'intensifier, notamment avec la priorité accordée aux industries de défense, qui sont présentes sur le territoire régional.

 

Le Commissaire européen Thierry Breton espère l'adoption de cet acte pour juin ou juillet 2023. Une confiance justifiée, puisque les députés européens ont voté favorablement ce mardi 9 mai 2023 en faveur du déclenchement de la procédure d'urgence, permettant ainsi d'accélérer l'examen de la proposition législative portant sur « l'Acte de soutien à la production de munitions ».

 

Ainsi, sur le fond, cette dynamique d'essor de l'industrie européenne de défense recueille un consensus général. En témoigne l'appel récent des députés européens à "intensifier et à mieux coordonner leurs efforts pour investir dans les technologies critiques en matière de sécurité et de défense, afin de les mettre à disposition dans la plus large mesure possible et de créer un véritable marché européen des équipements de défense".

 

Toutefois, sur la forme, certains députés expriment des réserves, notamment en ce qui concerne le financement d'un tel dispositif. En effet, la Commission européenne n'a pas annoncé de nouveaux fonds propres, ce qui a conduit certains à dénoncer "l'illusion selon laquelle on pourrait utiliser le même argent deux fois". D'autres estiment également que l'industrie de défense réalise déjà d'importants bénéfices et appellent ainsi à coupler cet acte avec "une taxe sur les profits excessifs du secteur de la défense".

 

Plus d’info : auprès du Bureau de Bruxelles – Adrien GRAFFAGNINO – agraffagnino@remove-this.maregionsud.fr