Vers un mécanisme européen dédié aux territoires transfrontaliers

Vers un mécanisme européen dédié aux territoires transfrontaliers

Le Comité européen des Régions a adopté à l’unanimité le 10 octobre dernier un rapport porté par Magali ALTOUNIAN, Présidente de la Commission Europe de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur et adjointe au Maire de Nice, demandant à la Commission européenne de présenter une nouvelle proposition visant à mettre enfin en place un mécanisme européen transfrontalier, outil susceptible de faciliter la vie des citoyens, des travailleurs et des industries dans les régions frontalières.

130 millions de citoyens, soit environ 30% de la population de l’Union européenne, vivent actuellement dans des zones frontalières. Les habitants de ces zones, comme les Alpes-Maritimes, partagent avec leurs voisins européens des habitudes de vie, un patrimoine culturel et naturel commun, des enjeux similaires. Pourtant, il existe encore de nombreux obstacles juridiques et administratifs qui impactent directement la vie de ces habitants.

 

En effet, ils réduisent l’intensité des interactions transfrontalières en affectant négativement des domaines tels que l’économie, l’accessibilité, la santé, le social, l’environnement et la qualité de vie des habitants. Ils complexifient les projets communs, en particulier ceux portant sur les infrastructures.

 

L’impact de ces obstacles est estimé à 458 milliards d’euros, soit 3 % du PIB de l’Union Européenne et 8,7 % du PIB total des régions frontalières terrestres.

 

En Provence-Alpes-Côte d’Azur, les défis auxquels sont confrontés les territoires transfrontaliers témoignent de la nécessité et de l’urgence d’une meilleure coordination des interventions publiques et de la mise en place d’actions conjointes. La tempête Alex, qui a fortement frappé la zone méditerranéenne franco-italienne, a mis en relief les conséquences du changement climatique et la coopération à renforcer dans la gestion des risques naturels majeurs. Durant cette période, la question de l’accessibilité et la place du transport ferroviaire, pour désenclaver les vallées transfrontalières, s’est révélée cruciale. La pandémie a, quant à elle, soulevé l’impérieuse nécessité d’une meilleure coordination des Etats en matière de coopération sanitaire.

 

Si l’Union Européenne propose des instruments pour faciliter les solutions financières ou institutionnelles, si des outils de gouvernance transfrontalière existent dans certains Etats membres, il n’existe à ce jour aucune disposition légale facilitant des solutions juridiques au niveau de l’Union Européenne.

 

Dans ce contexte, la Commission européenne avait proposé dans un règlement en 2018 une première mouture de « Mécanisme européen de transfrontalier ». Il prévoyait un mécanisme volontaire axé sur les frontières terrestres de l'UE. Ce mécanisme aurait permis d'appliquer, dans un État membre donné, les lois d'un État membre voisin si les lois du premier constituent un obstacle juridique à la réalisation d'un projet commun transfrontalier.

 

Bien que le règlement ait été adopté par le Parlement européen, un certain nombre d’États membres ont émis de grandes réserves, et les discussions ont été suspendues.

 

Néanmoins, le Parlement européen et le Comité européen des Régions ont constaté une grande valeur dans ce règlement pour les régions frontalières et demandent qu’un nouveau règlement, ou un règlement modifié, soit proposé par la Commission européenne pour répondre à certaines préoccupations des États membres. Selon le Comité européen des régions, une telle proposition de règlement doit couvrir les aspects suivants pour surmonter les réticences des Etats membres :

  • la complexité du règlement : il convient de le simplifier et préciser les procédures décrites dans le règlement, tout en laissant suffisamment de flexibilité à chaque État membre,
  • le caractère volontaire des solutions à mettre en œuvre tout en insistant sur l’obligation pour les États membres de disposer d’un mécanisme efficace de résolution des obstacles s’ils choisissent de ne pas appliquer celui proposé par le règlement ;
  • la clarification des procédures, au cas par cas, en fonction des projets plutôt que d’opter pour un outil par frontière comme cela figurait dans  la proposition initiale de règlement
  • la précision quant au type de projets ou obstacles auxquels le mécanisme s’adresse et le champ géographique couvert au bénéfice des territoires frontaliers.

Le Comité européen des Régions indique également que la mise en place de points de coordination transfrontaliers dans chaque État membre parait essentielle. Ces points de coordination devront être facilement identifiables par les régions, leurs citoyens et entreprises qui souhaiteraient signaler un obstacle transfrontalier. Les points de coordination traiteront ces demandes et proposeront des solutions pour surmonter les obstacles identifiés.

 

Une nouvelle proposition de règlement par la Commission européenne sur ce sujet est attendue le 13 décembre prochain. S’il voit le jour, un tel mécanisme représentera une véritable valeur ajoutée pour faciliter les projets transfrontaliers dans notre région.

 

Pour nourrir ses travaux, la Commission européenne a lancé une consultation publique afin de recueillir auprès de l’ensemble des parties prenantes concernées des exemples d’obstacles qui pourraient être levés par un tel mécanisme.