En effet, l’AI Act est un texte particulièrement important pour le futur de l’intelligence artificielle, avec une approche basée sur le niveau de risque pour les utilisateurs et un bannissement des usages comportant un risque jugé inacceptable ; ainsi que des obligations de transparence et de gouvernance pour les fournisseurs, proportionnelles aux risques. Ainsi, l’AI Act ne règlemente pas les technologies en elles-mêmes et cherche à trouver un juste milieu entre le respect des droits fondamentaux et le maintien d’un contexte favorable à l’innovation.

Les débats entre les colégislateurs européens ont toutefois montré l’existence de fortes divergences de point de vue, principalement en ce qui concerne les usages pouvant avoir un niveau de risque jugé « inacceptable », les exemptions pouvant être accordées, ainsi que la régulation à proposer ou non pour les modèles de fondation (aussi appelés IA génératives).

•            Accord provisoire du 8 décembre 2023

L’accord provisoire du 8 décembre 2023 entre les représentants des Etats membres et le Parlement européen a notamment permis de parvenir aux compromis suivants :

-             Les forces de l’ordre pourront bénéficier d’exemptions leur permettant d’utiliser certains systèmes d’IA dans le cadre de leurs fonctions et dans certains cas justifiés. Il s’agit par exemple de l’usage de la reconnaissance biométrique à distance en temps réel dans des lieux publics après obtention d’une autorisation.

-             Les modèles de fondation devront respecter des obligations de transparence avant d’être mis sur le marché. Un régime plus strict s’appliquera aux modèles dits « à fort impact » ou « systémiques », définis en fonction de la quantité de calcul utilisé à l’entraînement (seuil de 10 puissance 25 flops).

•            Validation de l’accord provisoire par les représentants des Etats membres

Une fois l’accord provisoire du 8 décembre obtenu, des négociations supplémentaires ont été engagées pour finaliser certains points techniques du texte. Certains Etats membres, dont la France, ont tenté d’obtenir de derniers ajustements du texte lors de cette période en laissant planer un doute sur leur approbation définitive de l’AI Act. Les demandes de la France portaient notamment sur un rehaussement du seuil de calcul permettant de considérer un modèle de fondation comme étant « systémique » afin de ne pas pénaliser la compétitivité des entreprises européennes et sur l’instauration d’un système de « tiers de confiance » pour gérer les questions de droits d’auteur à la place des entreprises et protéger le secret des affaires.

Le 2 février 2024, les représentants des Etats membres ont finalement approuvé le texte de compromis. La question du secret des affaires a été intégrée dans l’un des considérants du texte, mais la France n’a pas obtenu satisfaction sur le seuil de calcul. La Commission européenne a toutefois joint une déclaration écrite au texte par laquelle elle s’engage à prendre en compte l’évolution rapide des performances des modèles de fondation pour la mise à jour des critères permettant de qualifier un modèle comme étant systémique.

•            Approbation de l’accord provisoire par le Parlement européen

De son côté, le Parlement européen a approuvé l’accord provisoire du 8 décembre 2023 avec un premier vote en commission IMCO (Marché intérieur et protection des consommateurs) à une large majorité (71 voix pour, 8 contre et 7 abstentions). Le texte a ensuite été approuvé en plénière le 13 mars 2024, avec un soutien massif des eurodéputés (523 voix pour, 46 contre et 49 abstentions).